Considérations ubahnesques

sur l’espace temps

 

Ubah se dirigeait vers la chapelle du petit monastère ce deuxième dimanche d’Avent.

Comme souvent il avait mal dormi.

Récriminations incessantes contre ce monde qu’on lui avait fait. Qu’il devait subir.

Sans possibilité aucune d’intervenir sur le cours décevant des choses.

Et pourtant tout au long de ce trajet des centaines de fois accompli se faisait sentir en lui une certaine excitation interne.

Qui l’aurait presque fait rire. D’un rire moqueur. D’un rire vengeur.

Il venait de trouver une explication à ce qui l’avait intrigué depuis près de 50 ans maintenant.

Non ce n’était pas possible ! une explication aussi simple à ce qui avait représenté pour lui une énigme quasi mystique !

Pour lui et pour d’autres et pour les plus grands savants puisque le grand Camille Flammarion lui-même n’y avait rien compris !

Revenaient à sa mémoire tous les livres qu’il avait lus ou essayé de lire et où il avait sombré dans l’incompréhension et la lassitude.

Mais, maintenant, depuis cette nuit il tenait la solution. Encore un peu éthérée mais ce n’était qu’une question d’heure ou de minutes.

L’homélie ce matin était particulièrement assommante.

Le jeune prêtre grand et maigrichon parlait fort bien de l’évangile mais Ubah attendait autre chose.

Comme chacun des dimanches précédents.

Il continuait à faire acte de présence, malgré ses douleurs, ses courbatures, car la liturgie lui convenait parfaitement.

Tout était bien agencé, propre. Presque luxueux. Puis le latin et le chant plein de fluidité et de douceur des sœurs du petit monastère le rassuraient.

Alors qu’Isaïe et St Jean faisaient leur apparition Ubah ouvrit son livre de messe à la dernière page. Vierge.

Il écrivit la formule qu’il avait si souvent employée bien des années auparavant alors qu’il était lycéen :  e = ½ g t².   

Ses raisonnements nocturnes lui revenaient à l’esprit…

Dans un système de gravitation correspondant à une accélération g était demandé un temps égal à la racine de 2e/g pour parcourir e.

Si cette accélération augmentait par l’action de quelque phénomène qui ne concernait pas Ubah et dont il n’avait cure la quantité 2e/g diminuait faisant ainsi diminuer la quantité t.

Ubah s’intéressa alors à la nature de ce temps. Il n’en disposait que peu lui-même et le lieu ne s’y prêtait guère. Mais cela lui paraissait indispensable.

Temps sidéral, tropique, atomique… Il pensa alors que tous ces différents temps faisaient eux-mêmes partie d’un temps plus universel, cosmique.

Qui continuerait à exister même si eux-mêmes venaient à disparaître suite à une quelconque catastrophe bien naturelle anéantissant nos repères célestes habituels.

Il décréta que ce temps serait compté en Unité de Temps de l’Horloge Universelle ou UTHU.

Le jeune prêtre prononçait à ce moment les belles paroles du prophète Isaïe

<<Tout ravin sera comblé, toute montagne et toute colline seront abaissées, les passages tortueux deviendront droits, et les escarpements seront changés en plaine.>>

Ubah pensait que cela était un signe. Un encouragement de l’Esprit Saint. Oui avec l’aide des cieux il allait comprendre.

Il traça alors sur l’avant-dernière page de son livre de messe, par bonheur vierge elle aussi,

une droite verticale d’origine x et montant vers y à laquelle il donna la longueur e.

Du côté gauche il écrivit g accélération dûe à la pesanteur, puis m pour mètre et s pour seconde.

Ce côte de la droite correspondrait donc au système terrestre.

Sur cette dernière page du livre de messe Ubah eut le temps de dresser une application chiffrée avant que ne commence le Crédo.

Il dût se dépêcher.

Ayant posé t=racine de 2e/g il prit pour valeur de e 1000m et pour celle de g le classique g=9,81m/s/s et trouva ainsi t= 14,27 UTHU

Faisant alors varier g arbitrairement et lui donnant la valeur 25m/s/s sans se préoccuper de savoir si cela était chose possible,

une simple démarche expérimentale, il trouva pour la même distance un temps très proche de 9 UTHU.

Il conclut alors que tous les ouvrages de divulgation qu’il avait lus et non compris l’auraient amené à déduire que

pour une distance constante e sur l’horloge universelle de l’espace temps 14,27 UTHU écoulées à g=9,81m/s/s et

9 UTHU écoulées à 25m/s/s étaient la même chose.

Lorsque 9 UTHU s’étaient écoulées dans le système où g=25m/s/s

14,27 UTHU s’étaient écoulées dans celui où g=9,81m/s/s

Dans un système où l’accélération est de 25m/s/s chaque UTHU équivaut à

14,27/9 = 1,58 UTHU d’un système où l’accélération est de 9,81m/s/s.

Le temps y passe donc moins vite.

Ubah se sentit soulagé. Après tant d’années d’incertitudes il venait de trouver une solution à sa portée.

Solution qui lui permettait maintenant de comprendre pourquoi les voyageurs spatiaux des films de science-fiction de sa jeunesse

rentrant d’un voyage lointain avaient moins vieilli que leurs semblables restés sur terre.

Il accepta cela comme chose probablement vraie et entonna de bon cœur le Credo in unum Deum.

Entre l’Agnus Dei et le Domine, non sum dignus il pensa même que cette théorie relativiste était bien plus simple que ce que l’on avait toujours dit.

Expliquée à sa façon il était sûr qu’il l’aurait comprise dès la classe de troisième.

Pensant là faire pêché d’orgueil il récita immédiatement un nouveau Confiteor puis alla communier.

L’ite missa est le trouva dans une bien meilleure humeur que soixante et douze minutes plus tôt lors de l’Asperges me.

Ses douleurs avaient même pratiquement disparu lorsqu’il sortit de la chapelle .

Un beau dimanche s’annonçait.

L’après-midi il fit un joli dessin pour matérialiser tout cela.

bdFY gFXjvJd  4 12 2011

 

 

PS

Comme… Plus Sérieux :

La Relativité   Paul Couderc aux PUF   Collection Que sais-je ?

http://ww2.college-em.qc.ca/relativite-animee/

"Pour comprendre simplement la théorie de la Relativité"

Jean Hladik

"Comment le jeune et ambitieux Einstein s'est approprié la Relativité restreinte de Poincaré"

Jean Hladik

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Et... pour ceux qui doutent:

Maurice Allais

 

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